Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
le blog de gab
12 octobre 2006

Soutien à redeker : l'un signe, l'autre pas

voir le texte de soutien ici

« Je suis choqué par la légèreté analytique de ce qu'a écrit M. Redeker : je me découvre irrévocablement agent de haine et irrécusablement archaïque, et barbare, du fait que j'ai été formé en tant que sujet par la structuration symbolique et imaginaire nourrie par la fréquentation coranique. Cette inférence est inacceptable, même pour le musulman athée que je suis. Un tel texte est égal aux pamphlets antisémites les plus abjects, ceux écrits par Céline par exemple. L'utilisation en une telle abjection de feu mon ami Maxime Rodinson est scandaleuse. Et, s'il était parmi nous, il aurait partagé un tel scandale. L'enjeu de tous est d'aider à ce que l'islam neutralise ses démons islamistes. Ma critique de l'islam et de son évolution est des plus radicales, des plus exigeantes aussi, elle est le produit d'un savoir qui éclaire le sujet approché. Elle est surtout mue par l'amour du sujet et non par sa haine et son désir de destruction. Malgré ces réserves graves, jamais je ne céderai devant la terreur islamiste et leur attaque constante des précieux acquis européens, dont ceux de la liberté d'exprimer son opinion. Et, dans la logique qui est la nôtre, l'abjection peut être soumise à l'instance juridique et non au règne sauvage des fatwas : aussi suis-je amené à joindre mon nom à la pétition en sa faveur. »

Abdelwahab Meddeb, écrivain et poète tunisien, animateur de l'émission "Culture d'islam"sur France Culture, auteur de "La maladie de l'islam" (Editions Le Seuil, 2002 ) .Courrier à Libération, 6-10-2006.

 

 

« Nous cheminons sur une route bordée de deux gouffres profonds. Je crains que les intellectuels signataires de l' "appel en faveur de Robert Redeker" n'aient vu qu'un seul précipice et qu'ils reculent horrifiés devant lui au risque de tomber au fond du ravin qu'ils n'ont pas voulu voir.
Mon accord avec eux est complet en ce qui concerne la défense vigilante de la liberté d'expression.
[…]
Il faut donc regarder de plusieurs côtés à la fois. On peut, on doit défendre les droits élémentaires d'une personne sans abandonner tout esprit critique à son égard. "Quel que soit le contenu de l'article de Robert Redeker" écrivent les signataires sans autre précision. Je regrette, là je ne peux plus du tout les suivre. Combattre le gouffre de l'intolérance n'implique pas de se coucher devant la bêtise haineuse. […] l'auteur dénonce les "intellectuels qui incarnent l'oeil du Coran, comme ils incarnaient l'oeil de Moscou, hier" et "ne s'opposent pas à la construction de mosquées".
La lecture de texte qu'opère Redeker est inadmissible s'agissant d'un professeur de philosophie dont le devoir professionnel serait d'enseigner l'objectivation, la prise de distance à l'égard de ses affects, l'analyse critique. Le soutenir doit donc s'accompagner de la mise en cause du contenu et de la forme de ses propos.
Non, je ne comprends vraiment pas le "quel que soit le contenu de l'article" et je ressens cela comme une grave menace pour la liberté de penser elle-même. J'imagine la situation en 1894 ; supposons une minute qu'ait existé alors un groupe d'extrémistes menaçant Edouard Drumont ou un autre publiciste antisémite (qui lisaient les textes exactement de la même manière), pouvons-nous concevoir ceux que l'affaire Dreyfus allait faire qualifier d'intellectuels écrivant pour défendre le publiciste attaqué : "quel que soit le contenu des articles de La Libre Parole (l'organe de Drumont)..." ? La recherche historique montre que tous les thèmes antidreyfusards circulaient avant l'affaire Dreyfus. De tels stéréotypes sont permanents ; seules changent les minorités qu'ils transforment en boucs émissaires. La lutte contre l'intolérance ne dispense pas de la lutte contre la bêtise haineuse. » 

Jean Baubérot, historien, spécialiste de l'histoire de la laïcité à l'Ecole pratique des hautes études.
Le Monde, édition du 06.10.06

 

 

 

Deux analyses proches l'une de l'autre, qui font toutes deux le rapprochement entre la position de Redeker et l'antisémitisme le plus abject… Et pourtant l'un signe et l'autre pas…

Abdelwahab Meddeb ne cédera jamais devant la terreur islamiste, est-ce à dire que Jean Baubérot a cédé ?

En tout cas il monte en épingle le "quel que soit le contenu…", mettant ainsi au même niveau l'expression d'une opinion et une menace de mort.

Il reproche à Robert Redeker de faire un usage "tronqué et unilatéral des dires de M Rodinson", mais il use du même procédé vis-à-vis de Redeker quand il tronque une citation de la tribune incriminée, en en altérant ainsi complètement le sens : Robert Redeker disait : "ceux-là même qui s’élevaient contre l’inauguration d’un Parvis Jean-Paul-II à Paris ne s’opposent pas à la construction de mosquées", soulignant ainsi le peu de cohérence de certains défenseurs de laïcité. Faut-il rappeler par ailleurs à Jean Baubérot, spécialiste de la laïcité, que "la République ne reconnaît, ne salarie ni ne suventionne aucun culte" ?

Baubérot feint de consisérer que Redeker est dans l'exercice de sa profession quand il écrit cette tribune. Évidemment il n'en est rien. L'histoire de la philosophie est parcourue de pamphlets, de polémiques, d'écrits incendiaires, et la tribune de Redeker est dans cette tradition.

Baubérot n'argumente pas contre Robert Redeker, il parle de bêtise haineuse, il compare Redeker à Drumont. Il semble pourtant qu'il y ait de la marge. Pour mémoire, l'humoriste (sic) Dieudonné a été définitivement lavé de tout soupçon d'antisémitisme quand il a déclaré à "Lyon Capitale" en janvier 2002 :

« Le racisme a été inventé par Abraham. “Le peuple élu”, c’est le début du racisme. Les musulmans aujourd’hui renvoient la réponse du berger à la bergère. Juifs et musulmans pour moi, ça n’existe pas. Donc antisémite n’existe pas parce que juif n’existe pas. Ce sont deux notions aussi stupides l’une que l’autre. Personne n’est juif ou alors tout le monde. Je ne comprends rien à cette histoire. Pour moi, les juifs, c’est une secte, une escroquerie. C’est une des plus graves parce que c’est la première. Certains musulmans prennent la même voie en ranimant des concepts comme “la guerre sainte” etc. »

Cette marge, Baubérot feint de ne pas la voir. Je trouve Meddeb beaucoup plus sincère, respectable, quand, visiblement profondément blessé, il ne voit pas lui non plus cette marge, et qu'il compare lui aussi le texte de Redeker aux "pamphlets antisémites les plus abjects". Meddeb ne cherche pas à argumenter , il nous fait part de son émotion, et cela est plus troublant, et cela d'autant plus que Meddeb soutient Redeker…

Je lis et je relis le texte de Redeker. Je comprends qu'il puisse blesser un musulman, mais je n'y vois pas de ligne rouge franchie, je n'y vois pas de problématique "racisme anti-musulman", comme on a pu parler il n'y a pas si longtemps que ça de "racisme anti-chrétien", ou de "racisme anti-français". Le passage le plus litigieux me semble être celui où Redeker dit : " Haine et violence habitent le livre dans lequel tout musulman est éduqué, le Coran." Il y a là un début de stigmatisation du musulman. En admettant même que haine et violence soient les seuls habitants du Coran, il est faux de croire que tout musulman est éduqué dans cette haine. Fort heureusement la pratique religieuse du musulman de base s'autorise bien des prises de distance, des accomodements…

Est-ce à dire que tous les musulmans, ou plus précisément les "musulmans athées", comme le dit Meddeb, ont été choqués par la tribune de Redeker ? Eh bien, peut-être pas, mais il faut aller chercher… dans le monde musulman !

http://www.makabylie.info/?breve918

Enfin, musulman… Dans la sphère d'influence musulmane, mais il y a de la résistance, apparemment, comme on s'en aperçoit en se promenant dans le site…

On peut voir aussi cette extraordinaire vidéo d'une interview de Wafa Sultan à la télé danoise, à propos de l'affaire des caricatures.

Voir la biographie de Wafa Sultan sur Wikipedia.

D'origine syrienne, elle est maintenant installée aux Etats-Unis. Elle s'est rendue célèbre par une intervention sur la chaîne Al Jezira, le 21-2-2006.

Où on peut se dire que, finalement, Redeker est relativement modéré…

 

Et puis, tant qu'on y est, deux citations de Nietzsche :

"L'espèce d'homme la plus vicieuse est le prêtre: il enseigne la contre-nature. Contre le prêtre, on n'a pas de raisonnements, on a les travaux forcés."
(L'Antéchrist)

"J'appelle le Christianisme l'unique grande malédiction, l'unique grande corruption intime, l'unique grand instinct de vengeance, pour qui aucun moyen n'est assez venimeux, assez secret, assez souterrain, assez mesquin - je l'appelle l'immortelle flétrissure de l'humanité..."
(L'Antéchrist)

Ouh là ! il faudrait pas s'aviser de parler de l'islam comme ça !

Publicité
Publicité
Commentaires
G
Une chose est de polémiquer, de discuter et d'argumenter, et même faire preuve de mauvaise foi, d'outrance dans ses propos, autre chose est de menacer de mort quelqu'un pour ses propos. Je ne suis pas d'accord avec Baubérot, je le dis, mais je ne pense pas à refuser sa liberté d'expression à Baubérot, pas plus que Rédeker ou Meddeb ne le font d'ailleurs.<br /> Je me souviens d'un début de dialogue entre Meddeb et Redeker sur le plateau de "ce soir ou jamais". Le dialogue peut être rude mais il est possible.<br /> Baubérot fait ce qu'il veut avec cette pétition. Je pense ce que je veux de son attitude, et je le dis. Il n'y a pas de problème. Le problème commence quand on vous demande, qu'on vous impose, de suivre les commandements d'une religion qui n'est pas la vôtre.
J
Abdelwahab Meddeb et Jean Baubérot font visiblement la même analyse de la prose de Redecker. Meddeb, si on se donne la peine de le lire sans oeillères, serait même finalement beaucoup plus sévère. Le 1er se joint à la pétition mais se démarque donc nettement du "Quel que soit le contenu de l'article de Robert Redeker" de ladite pétition. Baubérot dit son accord avec elle, en ce qui concerne la "défense farouche de la liberté d'expression".<br /> Et les signataires de cette pétition sont de si farouches défenseurs de la liberté d'expression qu'ils la refusent à Baubérot.
J
Abdelwahab Meddeb et Jean Baubérot font visiblement la même analyse de la prose de Redecker. Meddeb, si on se donne la peine de le lire sans oeillères, serait même finalement beaucoup plus sévère. Le 1er se joint à la pétition mais se démarque donc nettement du "Quel que soit le contenu de l'article de Robert Redeker" de ladite pétition. Baubérot dit son accord avec elle, en ce qui concerne la "défense farouche de la liberté d'expression".<br /> Et les signataires de cette pétition sont de si farouches défenseurs de la liberté d'expression qu'ils la refusent à Baubérot.
G
Très intéressante reflexion, et qui engage à son tour à bien des réflexions... Le parallèle avec la merde est bien intéressant aussi : hélas, la merde, d'une certaine façon, est toujours là, et si les dieux disparaissent, le "fait religieux" a un parfum d'éternité...<br /> Il est sûr que tout passe, et peut-être est-ce ce constat angoissé qui nous pousse justement à croire à une certaine pérennité, à une certaine permanence. La foi, la croyance (qui est la foi des autres), sont des réponses très fortes à un besoin irrépressible, le besoin de trouver, de donner un sens à "la vie", à "tout cela"... Il y a là un mystère... Mais le danger commence là ou la croyance devient figée et dogmatique, où la foi devient la loi... Il vaudrait d'ailleurs mieux dire que le danger s'est trouvé révélé, circonscrit quand la loi s'est séparée de la foi...<br /> Voilà donc des méditations fort opportunes. Le discours de Ratisbonne est dans le droit fil de cette réflexion sur la foi et la raison. Dommage que la mauvaise querelle faite au pape masque les autres aspects de ce texte qui me parait tout à fait important et intéressant... À suivre, donc !
C
Que d'informatons,que de paroles et de déclarations!Bravo,Gab.<br /> Je me suis souvent poser la question:QU'ELLE EST LA DUREE DE VIE D'UN DIEU?<br /> La réponse est:très variable.<br /> Une évidence d'abord:les civilations disparaissent.Elles avaient toutes des religions,et donc des dieux:ils meurent avec elles.Les dieux sont réellement mortels.<br /> Il faut se transporter dans le temps et l'espace;d'abord c'est marrant.Les aztèques et les mayas par exemple avaient une multitude de dieux dont quetzacoatl et tezcatlipoca.Ils croyaient que l'univers avaient des cycles,que les dieux 3 fois l'avaient anéanti et que la seule façon d'éviter un quatrième anéantissement était de leur offrir ce qui les apaisait:du sang humain.Les sacrifices humains ont augmentes avec la puissance de leurs empires,atteignant un nombre esimé à 10000 victimes en une seule cérémonie.La religion structurait totalement la société.Tous les individus CROYAIENT ces dogmes.Puis les éspagnols sont arrives,avec LEUR religion,l'ont trouve abominable,ce qui ne les a empécher de reduire tous ces peuples en esclavage ,les considérant comme non humains(jusqu'à la contrevers de Valladolid,je sais..).<br /> Quelle est la plus ancienne civilisation à l'heure actuelle,et donc grosso modo la plus ancienne religion?Je pense qu'on peut affirmer que c'est l'hindouhisme(je met à part l'animisme,evidemment:il n'a jamais structuré de société)Quel age?Apeu près 5000 ans.en comptant très large.Mais c'est une sorte de record.<br /> je dirais que la durée moyenne d'une religion doit tourner autour de 2500 ans,à la louche.Après,les dieux meurent.<br /> Dans l'intervalle,en général,ils ont fait de sacres dégats.<br /> Je bien d'accord avec Nietzche.Et j'ajouterai ce que je pense vraiment:discuter de religions,c'est comme discuter de la couleur et de la substance de la merde:est-elle marron?Est-elle plutot claire?Est-elle<br /> dure?ou bien trop molle?<br /> De toute façon elle disparaitra,totalement et définitivement oubliée.<br /> De meme pour les religions.
le blog de gab
Publicité
Archives
Publicité